Chapitre 1: La Citadelle des Ténèbres

En cet été de l'an 1076, durant la première ère dont se souvienne l'humanité, un jeune paladin nain, répondant au nom de Kairn Kokharm, ainsi que son fils adoptif, un humain élevé en guerrier, Guts "Tenshi" Kokharm, partagent leur monture sur la route menant au village de Teless.

Leur village d'origine, Thorim, se trouve au pied de la montagne, à deux jours de marche de Teless. Ils quittent la tranquillité de leur foyer car les voeux de Kairn l'obligent à enquêter sur une étrange affaire éveillant ses soupçons. Des gobelins seraient en possession d'un arbre dont les pommes auraient des vertus curatives non négligeables, et ils vendent ces fruit une fois par an. Décidé à en savoir davantage, et craignant une ruse infâme de la part des gobelins, le voilà à cheval avec son fils.

Guts, quant à lui, est en pleine ébullition, au grand désarroi de son père. Il n'attend qu'une chose: se battre. Peu importe la cause, les récits et les contes qui l'ont bercé l'ont captivé par la force des combats qui en découlent. Prenant grand soin de son estramaçon, il désire avidement faire ses preuves aux yeux de son père... Et de lui même.

A mi-chemin, ils établirent un camp: un feu de bois et une paillasse, pour être plus précis. Les nuits sont chaudes, et un seul d'entre eux dort alors que l'autre monte la garde, alors cela suffit. Néanmoins, la nuit ne fut pas paisible. Alors que Kairn surveille les alentours, ses oreilles perçoivent des ordres émis par des gobelins. Avant même de pouvoir révéiller son fils, une volée de javelines s'abat sur eux, et c'est une d'entre elles qui sortit le jeune guerrier de sa torpeur, le bras balafré.
Ils n'étaient que trois, le combat fut bref, et un seul brigand survécut, prenant aussitôt la fuite. Se croyant à l'abri, Kairn obligea son fils à se rendormir, quitte à passer une nuit blanche. Hélàs...
Le fuyard revint, trois heures plus tard, renforcé de neuf camarades. Guts fut rapidement révéillé, et l'instant d'après, le sol était criblé de javelines. Les deux aventuriers ne furent pas épargnés.
C'est alors que Guts, grièvement blessé et pour ainsi dire, fou de rage, chargea avec le restant de ses forces, accompagnant à son mouvement un hurlement de rage désespérée. Les gobelins, devant sa folie meurtrière, prirent leurs jambes à leurs cous, et ne revinrent pas.

Mais cela, père et fils ne le surent pas, car ils plièrent aussitôt bagage, et, somnolants, reprirent la route. La monture, quelque peu reposée et à l'abri des combats, tint bon. Kairn, obstiné à protéger son fils, fut vaincu par sa fatigue et piqua du nez durant le reste du trajet.
Dans un geste tendre et affectueux, Guts arrêta la monture, et déposa son paternel sur la paillasse, afin qu'il se repose en meilleure posture, quelques heures du moins. Pendant ce temps, un marchand croisa leur chemin, et le guerrier marchanda quelques baumes de soins et du vin.

Une fois son père reposé, (et surtout révéillé d'un cri à pleins poumons à bout portant) ils reprirent le peu de route restant et atteignirent Teless à l'aube du 18 Août.

...Suite au prochain post

C'était un beau matin d'été, et Tom (le Vieux Sanglier, comme on l'appelle à Teless) n'avait pas eu de clients depuis pas loin d'un mois. Jusqu'à ce jour...

Un nain et un humain, tous deux grièvement blessés et visiblement éreintés, frappèrent à sa porte. La première chose qu'ils demandèrent, ce fut à manger, à boire, et un endroit douillet où se reposer. Enthousiaste, il se mit au travail de bon coeur.

Quand il revint avec ses côtes de porc rôties avec leurs pommes de terre en sauce, et trouva l'or posé sur la table, et les deux aventuriers mangèrent goulûement, accueillant le repas comme un cadeau du ciel. Rassasiés, ils partirent dormir sans demander leur reste.

Ils ont dû avoir une rude nuit, se dit l'aubergiste, avant de débarasser leur table.

Le soir, à leur réveil, Kairn et Guts avaient bien meilleure mine. Ayant retrouvé leurs forces, le nain commença à interroger l'aubergiste à propos du village et des rumeurs. Guts, pour sa part, préféra s'exercer à l'épée, n'ayant pas le parler très diplomatique.

Kairn apprit ainsi qu'un groupe d'aventuriers est porté disparu depuis un mois. Il était composé d'un guerrier et une magicienne, tous deux frère et soeur, ainsi qu'un rôdeur et un paladin, ce dernier n'étant pas originaire de la région.

"Par ailleurs, disait Tom, je me souviens que le paladin avait une épée à deux mains qu'il appellait Fracasseuse, et elle était magique, à n'en pas douter."

Ces mots attisèrent l'attention de Guts, qui cessa aussitôt ses exercices, ouvrant l'oreille dans l'espoir d'en apprendre davantage sur cette épée. Malheureusement pour lui, l'aubergiste était passé à autre chose:

"Je me souviens aussi d'un détail, Talgen et Sharwyn, les frère et soeur, étaient les premiers, et aussi les seuls à me poser des questions à propos de la Citadelle des Ténèbres depuis bien longtemps... Pour tout vous dire, la dernière personne avant eux était un certain Belak, un homme du genre peu souriant accompagné d'une énorme grenouille... C'était il y a treize ans, il me semble!"

La conversation continua, accompagné d'un bon repas, jusqu'à la nuit. Guts, n'entendant plus parler de la dénommée Fracasseuse, joua aux fléchettes pendant quelques heures. Après manger, Kairn partit se coucher. Son fils ne se rendit dans sa chambre qu'après une petite ballade en forêt, au clair de la lune.

Le lendemain matin, en pleine forme cette fois-ci, ils achetèrent à Tom quelques fournitures (dont une tente) et prirent la vieille route, à pied, en direction de la Citadelle. Le cheval eût, dès lors, de très longues vacances...

Avant de quitter le village de Teless, les deux aventuriers avaient cependant rendu visite au maire, afin d'en savoir davantage sur ce qui les attendait. Ils apprirent que les villageois ayant acheté les fameuses pommes avaient planté leurs graines dans l'espoir de cultiver le fameux fruit. Hélas, après un an, l'arbuste qui en résultait disparaissait soudainement, dans la nuit. Les gobelins étaient suspectés de voler ces plantes, pour maintenir leur monopole.
Aussi, le frère et la soeur disparus sont les petits-enfants d'une noble, Dame Hucrelle, habitant juste en face du maire lui-même.

"Par ailleurs, leur dit le maire, elle est désespérée d'avoir des nouvelles d'eux. Elle propose une récompense à ceux qui parviendraient à lui dire ce qui est arrivé, preuves à l'appui."

Ainsi Kairn et Guts frappèrent aussi à la porte de la vielle dame, qui leur proposa 250 pièces d'or à chacun s'ils lui apportaient des nouvelles de ses petits-enfants, ainsi que les deux chevalières en guise de preuve. Elle doublerait la somme s'ils lui ramenaient les deux jeunes aventuriers sains et saufs.

Il va sans dire, Kairn accepta humblement, et se fit dès lors un devoir de retrouver ces gens disparus, tandis que pendant ce temps, son fils se demandait quel genre d'épée il pourrait s'offrir avec une telle somme...


A ces pensées s'ajoutèrent le mystère des arbustes disparus, dans l'esprit du père, et celle de l'épée magique, Fracasseuse, dans celui du fils, tandis qu'ils avançaient sur la vieille route. Le soleil frappait fort, et les grillons s'en donnaient à coeur joie. Après trois heures d'insolation, les deux valeureux découvrirent une déchirure dans le sol, avec un pont détruit la traversant. La plupart des piliers qui, jadis, supportaient les cordes de sûreté ainsi que le pont lui-même étaient couchés. Certains, cependant, demeuraient debout, parmi lesquels un était pourvu d'une corde à noeuds solidement attachée et pendant dans le vide. Tous sont grossièrement peints avec des caractères nains, mais sans que Kairn en comprenne la signification. Le bord de la falaise, à côté de la corde, possède quelques prises, mais elles ont l'air peu sûres.

Finalement, ce fut Guts qui descendit le premier, suivi de son père, peu après. La descente, dans le noir complet, se prolongea pendant 25 mètres (instinct de nain), pour finalement donner sur une corniche sablonneuse, sur laquelle un gros rat affamé les attendait...

Le rat, si gros fut-il, ne résista pas à la lame de Guts.

Une fois au calme, Kairn et son fils adoptif aperçurent la fameuse Citadelle, en contrebas. Elle n'était que ruines et désolation, vue de là. Les marches, grossièrement taillées, étaient sûres, à condition de ne pas courir, et ce malgré le sable qui les recouvrait. Ils arrivèrent donc à une cour en ruines, au pied d'une tour effondrée. Il fut néanmoins difficile pour les deux aventuriers de parvenir jusqu'à celle-ci, le sol s'effondrant sous leurs pieds, et d'autres rats faisant leur apparition.

Tant bien que mal, ils pénétrèrent dans la tour, qui conservait les traces d'un combat contre des gobelins. L'un d'eux était d'ailleurs empalé à une lance, contre un mur. En fouillant la pièce, Kairn découvrit un passage dérobé, au sud, en plus des trois autres portes (en comptant celle par laquelle ils étaient arrivés). Ils commencèrent par là, et durent affronter trois squelettes animés... Ce qui, après les rats, faillit causer leur perte.

Forts de leur erreur, ils entreprirent de se reposer. Mais, avant cela, Guts mit en place le plan qu'il avait préparé depuis leur séjour à Teless: il avait acheté du fil de pêche, ainsi que des clochettes, afin de les installer pendant leur sommeil. Ainsi, ils pouvaient dormir tous les deux, en toute tranquilité. En théorie...

Heureusement pour eux, leur sommeil fut paisible, et quelque peu réparateur. Prenant la première porte sur leur gauche, ils arrivèrent à un couloir dont l'extremité s'était écroulée, et firent face à une porte en pierre à l'effigie d'un dragon se tenant sur ses pattes arrière. Cette dernière était fermée à clef.

Impasse, songea Kairn, mais Guts ne voyait pas cela du même oeil. Allant au bout du couloir, il apperçut deux lueurs rougeâtres, mais en lieu de joyaux, c'est un rat qu'il trouva. S'il ne survit pas longtemps, cela suffit à la créature pour le mordre violemment... Et de laisser dans le corps du jeune homme la graine de la maladie, qui ne se manifesterait que bien après.

La porte suivante fut plus prometteuse: trois portes dans le couloir. Une, en pierre, fermée à clef, et les deux autres, en bois, menant à deux pièces de tailles différentes, la première, petite et vide, la deuxième, plus vaste, et occupée...

...Par un jeune kobold endormi. Une cage vide, aux barreaux tordus, un autel rudimentaire, le foyer d'un feu éteint et des graffitis verts en Draconien sur les murs complétaient le tableau. Au-delà, quatre portes disparses et un étroit couloir en face des aventuriers.

Nos deux Kokharn avaient mis en place une tactique d'ouverture des portes: Kairn, véritable bouclier ambulant, était toujours à l'avant, et ouvrait toutes les portes avec grande prudence. (Ils n'étaient donc pas très rapides dans leur avancée, néanmoins, ils prenaient moins de risques) Le père fut donc le premier à pénétrer dans la pièce. Son regard s'arrêta sur la créature, non encore identifiée, qui dormait au centre de la salle. Avançant avec autant de prudence que possible, sans un bruit, il la regarda de près.

Identifiant l'ennemi juré de sa race à ses pieds, il abbatit sans hésitation sa hache sur le cou du kobold, séparant d'un coup net la tête du reste du petit corps. (Voir le sujet Avis des Joueurs)
Ceci fait, il entreprit de fouiller la pièce, méthodiquement, avec son fils. Ils trouvèrent plusieurs statuettes de jade, à l'éffigie de dragons, de petite taille. La cage vide les intrigua, ils soupçonnèrent les kobolds d'avoir emprisonné quelqu'un (sans doute un gobelin)

Ne trouvant pas grand chose d'autre d'intéréssant, ils poursuivirent leur chemin, explorant la première porte à leur droite. Arrivant à un couloir, ils continuèrent, celui-ci n'ayant qu'une seule issue: en suivant la méthode décrite plus haut, ils entrèrent dans une pièce déserte, au sol couvert de gravats, déjéctions de rats et des traces à l'origine douteuse. Le jeune Kokharn tenta tout de même de trouver quelque chose derrière cette désolation, mais à part l'unique porte, en face, il ne put ce ramasser des cailloux.

La salle suivante s'avéra moins désolante par la présence d'une fontaine, certes tarie, mais décorée et ornée d'une sculpture de dragon en train de plonger. Sur leur gauche, une nouvelle porte en pierre sculptée, les gravures représentant des squelettes de dragons. Au bout de la pièce, un large couloir menant à un croisement. Les aventuriers ne parvinrent pas à percer le mystère manifeste (mais bien dissimulé) se cachant derrière la fontaine, et continuèrent leur avancée.

Le couloir leur proposait de nombreuses alternatives, dont une série de cellules au nord, s'achevant par une pièce à peine visible, un éboulement à l'est et une porte à l'ouest. Nos aventuriers ont commencé par explorer les cellules, mais après avoir tué un rat sanguinaire habitant la première, ils changèrent d'avis pour se rendre à l'ouest.

Arrivant dans une salle désolée, les Kokharm prirent la seule porte se présentant à eux, au nord. Une clochette sonna, et quand la porte finit de s'ouvrir, père et fils firent face à trois gobelins cachés derrière un muret, ainsi qu'à leurs volées de javelines. Autant dire que Kairn, en bon nain en armure, ne sentit que les ricochets sur le métal. Par contre, Guts n'eut autre choix que de se cacher derrière son père, seul abri à sa disposition, en attendant de pouvoir charger.

Ce qu'ils firent, finalement... Malheureusement pour eux, il y eut un rescapé. Il alla rejoindre ses compagnons, afin d'organiser une nouvelle défense. Père et fils montèrent le camp dans la petite pièce derrière le muret, la seule autre issue se trouvant à côté de celui-ci, sur le mur sud. Une fois reposés, ils partirent sur les traces du rescapé... Pour se retrouver face à un muret plus large, accueillant une dizaine de gobelins, cette fois-ci.

Kairn, toujours sur la défensive, tenait bon... Mais sa lente manoeuvre mettait en péril son fils, moins à même de se défendre, mais tellement plus efficace en attaque. Pour finir, tous deux prirent la fuite, Kairn ayant perdu connaissance. Lors de leur repos, Kairn constata que non seulement son fils ne se révéillait pas, malgré les soins qu'il pouvait lui apporter (sans magie et sans matériel), mais en plus il prenait un teint verdâtre et inquiétant. La fièvre des marais portée par les rats se manifestait, au pire moment envisageable.

Cela eut un effet surprenant sur le nain. Son fils étant en péril, il prit son arme en main, et parcourut le donjon en sens inverse, anéantissant toute résistance sur son passage, à la recherche désespérée d'une solution. Deux rats et quelques kobolds en firent les frais, jusqu'à ce que, miracle, il découvre une potion de soins légers parmi les affaires d'un de ces derniers. Aussitôt, il fit demi-tour, fit boire la potion à son fils, et l'emmena, enfin conscient mais toujours malade, de retour à la surface, pour une visite à la guérisseuse du village. Une visite dont ils se souviendront à jamais...

La vieille guérisseuse du village affichait quelques soixante-dix-sept ans... Soit vingt ans de moins que son âge réel. Bien des années, plus tôt, elle avait été une belle femme, et elle garda cette beauté longtemps, grâce aux secrets transmis de mère en fille. Or voilà un demi-siècle qu'elle n'avait pas plu à un homme...

Guts, en guerrier musculeux frôlant ses vingt ans, était beau, fort et viril. De quoi attiser les braises en bien des femmes... Et surtout chez une femme qui n'avait pas connu de contact charnel depuis cinquante ans. Si le nain n'était pas à son goût, elle accepta cependant avec grand plaisir de s'occupper du jeune homme, et demanda à Kairn de les laisser, afin qu'elle lui prodigue les soins nécéssaires dans les meilleures conditions.

Notre ami le nain eut la mauvaise idée d'accepter. Durant les trois heures qui suivirent, il fit mine de ne pas entendre les différents bruits, aussi inquiétants que troublants, provenant de la maison de la vieille femme. Les cris de Guts, d'agonie, devenus de douleur, mêlés à ceux de la vieille folle et ses injonctions dont il aurait préféré ignorer le sens... Rapidement, à dire vrai plus rapidement qu'il ne l'aurait souhaité, le plaisir, la jouissance et la débauche firent surface parmi cette cacophonie.

Néanmoins, à la fin de ces trois longues et pénibles heures, le jeune guerrier sortit, épuisé, en sueur... Mais en pleine santé. Ainsi prit fin sa toute première expérience dans le domaine, aussi étonnante et traumatisante fut-elle.

Ni l'un ni l'autre ne voulant trop s'attarder sur le sujet, tous deux décidèrent de se reposer. Cependant, Kairn eut une idée. Il avait aperçu un de ces étranges buissons que le maire avait évoqué autour de la maison de la vieille guérisseuse. Avec l'autorisation de cette dernière, ils montèrent le camp au pied de sa maison, et montèrent la garde.

Le maire avait bien dit que les buissons disparaissaient, la nuit, sans doute pris par les gobelins, et Kairn était bien décidé à le vérifier. Il fut d'ailleurs le premier à monter la garde, cette nuit-là.